LA NON RECONNAISSANCE DE LA QUALITÉ D’ŒUVRE AUX ARTICLES DU JOURNAL "LA VOIX DU NORD"

Cour d’appel de Paris, Pôle 5, Chambre 1, 22 sept. 2020, « LA VOIX DU NORD c. Commune HÉNIN BEAUMONT », RG n°18/19018.

« De la plus humble à la plus haute, la création porte témoignage d’un créateur ».

Ces mots d’André Suarès (Voyage du condottiere, 1932) renvoient au critère unique de protection en droit d’auteur, à savoir l’empreinte de la personnalité de l’auteur sur son œuvre.

Dans son arrêt du 22 septembre dernier, la Cour d’appel de Paris est venue rappeler ce principe cardinal de protection sans formalité, du seul fait de la création d’une forme originale, tel qu’il découle des articles L.111-1 et L.112-1 du Code de la propriété intellectuelle, alors qu’elle avait à se prononcer sur un point bien précis : la possibilité d’une protection d’articles de journaux par le droit d’auteur.

En l’espèce, la société LA VOIX DU NORD, éditrice du journal éponyme et exploitant une page Facebook intitulée « La Voix du Nord d’Hénin Beaumont », découvre l’existence de la page Facebook « La Voie d’Hénin » ayant pour slogan « Réinformez vous sur l’actualité d’Hénin Beaumont » et reproduisant des articles précédemment publiés dans les journaux La Voix du Nord.

Elle assigne donc la commune d’Hénin Beaumont ainsi que l’exploitant de cette page Facebook, l’adjoint au maire, en contrefaçon, parasitisme et concurrence déloyale.

Or, pour rejeter ses demandes, la Cour relève qu’il s’agit de courts articles sans signature, si bien que l’identité de leur auteur est inconnue, et se contentant de relater des données factuelles.

En d’autres termes, il s’agit d’informations « objectives (…), dont il n’est ni prétendu ni justifié que leur articulation entre elles serait originale ».

Quand bien même les journalistes auraient eu recours à des effets de style, afin de rendre la lecture de leurs articles plus attractive, les juges insistent sur le fait qu’il s’agisse simplement d’une technique journalistique écartant ainsi tout traitement personnel des informations et toute expression de la personnalité ou de la sensibilité des auteurs.

Le critère de protection n’étant pas rempli, à savoir l’empreinte de la personnalité de l’auteur sur son œuvre, il n’y a là aucune création intellectuelle originale.

Par conséquent, toute possibilité de protection par le droit d’auteur se trouve écartée.

Il en va de même de la photographie annexée à l’un des articles et reproduite sur la page Facebook litigieuse : prise sur le vif lors d’une réunion publique et sans aucun parti pris artistique de la part du photographe, elle ne donne prise au droit d’auteur.

À noter que la société LA VOIX DU NORD avait également assigné les défendeurs en contrefaçon de marque, parasitisme et concurrence déloyale mais qu’elle a été déboutée de l’ensemble de ses demandes, tant en première instance qu’en appel.

Anaëlle Zumsteeg, en stage au sein du Cabinet BONVALET&DELIGHAZARIAN

Chloé Bonvalet